Parlons maintenant des sociétés unipersonnelles. Nous parlerons particulièrement des EURL et des SASU. Nous verrons ce que ces sigles désignent. « Sociétés unipersonnelles », le concept même est un peu étrange. Comment est-ce que l'on peut faire une société lorsque l'on est tout seul ? Comment est ce que l'on peut être associé unique ? La loi le permet. En réalité, depuis longtemps, il existe des sociétés qui sont, en fait, unipersonnelles, même si, en droit, on a plusieurs associés : vous savez que, dans beaucoup de sociétés, de petites sociétés particulièrement, même si l'on a plusieurs associés, une seule personne est véritablement intéressée à l'affaire. De même, dans les groupes de sociétés, pendant longtemps, on a vu beaucoup de sociétés qui étaient des filiales au sein d'un groupe : dans les sociétés anonymes, il fallait avoir sept actionnaires et on avait alors la société mère actionnaire à 99,99% et une action était donnée à différentes personnes qui étaient des actionnaires de complaisance. Ce n'est pas une bonne chose, mais dès lors que la loi demandait à ce que l'on ait un certain nombre d'actionnaires et dès lors que l'on voulait recourir à cet instrument de la société, on respectait formellement les textes et on passait par ce "montage". Le législateur a permis, dans un passé récent, que l'on puisse avoir des sociétés constituées dès le début (ab initio), par un seul associé. Ces sociétés sont, depuis 1985, l'EURL qui est une SARL unipersonnelle et la SASU. EURL cela veut dire Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée. En réalité, il faut bien comprendre que c'est une SARL à un seul associé. Ce n'est pas une forme sociale autonome : on ne crée pas une EURL, on créé une SARL dont on est le seul associé. Et l'autre forme de société que l'on peut créer dès le début avec un seul associé, forme qui est apparue, elle, en 1999, c'est la SAS unipersonnelle, la Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle. On parle de « SASU » en pratique, mais là encore, la forme est celle d'une SAS. Il faut bien comprendre qu'on ne peut pas constituer une société avec un seul associé pour toutes les formes sociales : on ne peut pas faire une société anonyme si on est tout seul. On peut commencer à plusieurs - le minimum est de sept pour une SA - , et ensuite on peut se retrouver seul parce que l'on vend ses actions, parce qu'on achète les actions des autres actionnaires, mais pour constituer une société tout seul, il faut être dans l'une des hypothèses prévues par la loi. Il faut parler ici d'un article qui est l'article 1832 alinéa 2 du Code civil. Vous vous rappelez de l'alinéa premier qui nous dit que « la société est instituée par un contrat de société. . . » et l'alinéa 2 déroge à cela en disant que « la société peut être instituée (…) par l'acte de volonté d'une seule personne », mais « dans les cas prévus par la loi ». Cela veut dire que ce n'est que lorsque la loi autorise la création d'une société unipersonnelle - pour l'essentiel les EURL et les SASU - , que l'on peut créer tout seul une société. Qu'est-ce que cela change d'être tout seul en société ? Cela change un certain nombre de choses dans le fonctionnement de la société : on a toujours une société - personne morale, mais il n'y a plus une collectivité d'associés, il y a un seul associé qui peut être dirigeant ou non. On n'a plus d'assemblée, on aura des décisions d'associé unique. L'associé unique devra faire bien attention à ne pas confondre la société et le patrimoine de la société avec son patrimoine personnel. Si je suis associé unique et gérant d'une SARL, je peux me dire que, finalement, la SARL et moi, c'est la même chose, mais vous imaginez que le jour où je vends la SARL, où je cède 100% des parts, peut-être que celui qui va acheter ma société va découvrir que j'ai fait un certain nombre de prélèvements dans les caisses sociales et, finalement, la société aux dépens de laquelle j'ai commis un abus de biens sociaux va peut-être porter plainte et peut-être que je serai poursuivi pour abus de biens sociaux pour avoir utilisé les biens de la société comme mes biens propres. Donc il faut ne pas perdre de vue, lorsque l'on est associé unique d'une société unipersonnelle, qu'on est associé d'une personne morale avec un intérêt distinct et qu'il faut respecter l'intérêt propre de cette personne morale. Un mot sur la dissolution des sociétés unipersonnelles. Le Code civil prévoit une règle de simplification, puisque lorsque l'on met fin à une société unipersonnelle, on sait déjà qui va récupérer, après la liquidation, l'actif et le passif de la société, mais pour simplifier les choses, le législateur a prévu que lorsqu'une société unipersonnelle est dissoute, on n'est pas obligé de faire une liquidation. En réalité, on ne fait pas de liquidation, sauf cas particulier et je vais vous expliquer la petite distinction à faire. Initialement, une société unipersonnelle ne faisait pas l'objet de liquidation lorsqu'elle était dissoute et on avait prévu une règle particulière. Cela remonte à 1988. On avait prévu qu'il y avait transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique. (Nous reverrons la transmission universelle de patrimoine à propos des fusions et des scissions). Ce mécanisme faisait que tout le patrimoine de la société unipersonnelle dissoute remontait vers son associé unique. Le danger de cela, c'est que tout le passif de la société va aller vers l'associé unique et comme c'est une solution rigoureuse et dangereuse pour l'associé, on l'a limitée. En 2001, on a décidé que la solution valait pour la société unipersonnelle dont l'associé unique était une personne morale. Donc, lorsque l'on dissout une société unipersonnelle, il faut distinguer : si l'associé unique est une personne physique, on enclenche une procédure de liquidation ; si, en revanche, notre associé unique est une personne morale, il y a transmission universelle de patrimoine, avec une possibilité d'opposition. En effet, un droit d'opposition est donné aux créanciers qui ont trente jours pour exercer ce droit, c'est-à-dire qu'ils vont saisir un juge, et que ce juge pourra ordonner éventuellement le remboursement immédiat de leurs créances ou la constitution de sûretés si la dissolution porte atteinte à leurs droits avec cet effet de transmission universelle de patrimoine.