À la base d'une société il y a souvent un contrat. Je dis « souvent » parce que ce contrat que nous allons voir maintenant, le contrat de société, on ne le rencontre pas dans toute société. Il y a tout d'abord des sociétés, qui se constituent avec un seul associé. Cela peut sembler bizarre, des sociétés d'un seul associé, mais il existe bien en droit français des sociétés unipersonnelles. Et puis il y a d'autres situations dans lesquelles, nous le verrons, le juge va reconnaître l'existence d'une société à la demande d'un associé, ou d'un tiers qui s'estime créancier des associés : cette société « créée de fait » dont l'article 1873 du code civil parle, est une société qui est, en réalité, constatée par le juge à partir des faits. Son nom l'indique bien. En principe une société se constitue par contrat. Je le répète : en principe, c'est la première règle qui est prévue par un texte que nous allons voir et qui est l'article 1832 alinéa premier du Code civil. Ce texte est important. Que nous dit-il ? "La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat (. . . )", voilà le contrat de société. Et pourquoi fait-on ce contrat ? Pour « (. . . ) affecter à une entreprise commune des biens ou l'industrie (. . . ) », c'est-à-dire une activité (c'est un vieux terme pour désigner une activité), et pourquoi cela ? « (…) en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter ». Alors ce texte nous dit et c'est la première chose que nous dit le Code civil sur la société, c'est en principe, par un contrat que l'on va constituer une société. Cela veut dire qu'il faut respecter les conditions que le Code civil prévoit pour les contrats et la plus importante c'est bien sûr le consentement : pour faire un contrat en droit français, il faut avoir consenti à ce contrat, il faut avoir échangé avec les autres parties au contrat son consentement, c'est-à-dire qu'il faut avoir accepté d'entrer au contrat et il faut l'avoir accepté consciemment. Cela veut dire notamment que si l'on a été trompé - c'est le dol -, ou si l'on s'est trompé - c'est l'erreur -, il sera possible de remettre en cause ce contrat. Parce que l'on est en présence d'un contrat, on rencontre les mêmes règles que pour les autres contrats qui sont que l'on n'est pas obligé d'entrer dans un contrat et qu'on n'est pas obligé d'entrer dans le contrat de société. Simplement, si nous discutons pendant longtemps ensemble, si nous avons de longs pourparlers pour faire une société, un projet de société, que nous discutons pendant très longtemps et puis au dernier moment je refuse de contracter, on ne peut pas me forcer à contracter, mais peut-être que j'ai engagé ma responsabilité délictuelle par la faute que j'ai commises en refusant de manière brutale de contracter. Peut-être que je n'ai jamais eu l'intention de contracter, voilà peut-être ma responsabilité civile pour faute délictuelle qui sera engagée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et non pas sur celui de l'article 1832 qui est le texte que nous étudions actuellement. Donc le contrat de société c'est la manière normale, la première manière prévue par le Code civil de constituer une société. Nous allons voir au cours de cet enseignement les différents éléments constitutifs spécifiques à ce contrat de société. C'est vrai qu'en pratique, on tend à oublier dans certaines sociétés, notamment dans les très grandes sociétés, qu'il y avait, au départ, un contrat.